Noëlle un peu inquiète par cette traversée me presse depuis
plusieurs mois à embarquer un équipier. De guerre lasse, à Mindelo, je me décide à emmener avec nous un jeune
couple de bateaustoppeurs. Alice et Théo sont deux danseurs et ont un projet de
contact avec les populations d’amérique du sud à travers la dance. Nous les
avions rencontrés à Dakar et les avons retrouvés à Mindelo en recherche d’un
embarquement pour le Brésil. Ils ne sont pas des marins, mais pourront assurer
la veille pendant les quarts de nuit.
Nous attendons la fin d’un coup de vent sur le sud des iles
du cap vert et décidons de partir le dimanche 22 décembre. La veille nous
disons au revoir aux amis en particulier à France et François en attente d’une
meilleure meteo pour le grand saut et aux jeunes de CRIQUET. Nous allons au mouillage où nous embarquons
Alice et Théo. Petit briefing sur la sécurité à bord, récupération de tous les
passeports pour les stocker dans les bidons de survie….
Dimanche a 12 h UTC nous levons l’ancre pour cette transat
de 1600 miles. C’est une des plus
courtes . Dans la première partie nous devons avoir les alizés de NE de
l’hémisphère nord, puis une zone avec des grains , du vent instable en force et
direction (c’est le pot au noir un peu au nord de l’équateur), puis on devrait
toucher des vents de sud est : les alizés de l’hémisphère sud.
Il faut passer
dans le pot au noir là où il est le
moins actif et le moins large. Mais la position et l’activité de ce pot varie
chaque jour. Michel notre copain d’Avel Dro s'est proposé de nous router pour passer au mieux.
Michel m’enverra deux fois par jour un mail avec les conditions meteo de la
zone pour les 3 jours et la position du pot au noir.
En partant nous faisons le tour du mouillage en actionnant
la corne de brume pour saluer les bateaux amis. Nous sommes trois bateaux à
partir au même moment mais nous nous perdons de vue très vite. Comme prévu le
vent est fort (30 nœuds) entre les iles, puis devient plus régulier au fur et à
mesure que nous nous éloignons de Mindelo. Il fait beau, la houle est au rendez
vous. Le bateau marche bien, à l’intérieur il devient un peu difficile de se
mouvoir .
Au fur et à mesure du temps passé, chacun s’installe dans la routine des journées de navigation : Lecture (tous les quatre), Sudoku (Alice et moi), travaux au crochet (Théo), Scrabble (Alice et Théo), broderie (Noelle), contemplation de la mer (tous), mail avec Michel pour la meteo et navigation (moi), cuisine et vaisselle (tous).
Au fur et à mesure du temps passé, chacun s’installe dans la routine des journées de navigation : Lecture (tous les quatre), Sudoku (Alice et moi), travaux au crochet (Théo), Scrabble (Alice et Théo), broderie (Noelle), contemplation de la mer (tous), mail avec Michel pour la meteo et navigation (moi), cuisine et vaisselle (tous).
Les quarts de nuit s’organisent : Chacun un quart de 3
heures entre 19h30 et 7h30. Consigne est de me réveiller en cas de changement
des conditions de vent et de route à
collision à moins d’un mile avec un cargo. Chaque jour nous faisons notre quart
à des heures différentes. Cette organisation nous permet de beaucoup nous
reposer. De plus dans la journée nous pouvons siester quand nous voulons.
Pendant la journée nous trainons deux lignes de pêche. Nous
attrapons 3 poissons : Une petite dorade coryphène, un joli tazard et un
poisson lune oblong. Avant de déguster ce dernier, nous demandons à Michel s’il
est comestible (il me conseille de profiter de la présence d’équipiers pour
tester la comestibilité du poisson !).
Nous perdons plusieurs leurres sur des touches de gros
poissons au grand désespoir de Noëlle, mais c’est tant mieux car je ne veux pas
remonter des prises de plus de 10 kilos.
Tous les matins nous ramassons sur le pont un ou deux poissons volants venus s'échouer en croyant échapper à un prédateur.
Tous les matins nous ramassons sur le pont un ou deux poissons volants venus s'échouer en croyant échapper à un prédateur.
La nuit nous mettons en route notre hydrogénérateur trainé.
Grâce à lui et aux panneaux solaires nous sommes complètement autonomes en
électricité. Nous n’avons jamais à mettre en marche le moteur pour recharger
les batteries. C’est un grand confort.
Les alizés de NE nous permettent une allure au portant avec
les voiles bien ouvertes, la houle de trois quart sur la hanche, souvent la
nuit un peu moins fort et faiblissant en allant vers le sud…
Eole et Neptune sont avec nous et nous offrent une traversée du pot au
noir très rapide : Nous traversons une première ligne de grains avec
beaucoup de pluie, ensuite le vent est très instable, nous utilisons alors le
moteur, 6 miles plus loin une deuxième ligne de grains (Théo et moi sommes trempés car nous avons manoeuvré les voiles),
en en sortant c’est le plaisir de trouver les vents de SE tant attendus et
signe que nous entrons dans le système de vent de l’hémisphère sud.
Par contre nous sommes à une allure de près, les voiles bien
bordées. Le bateau bondit de vagues en vagues, se soulève et retombe parfois
rudement. A l’intérieur, ouvrir un équipet, cuisiner ou faire la vaisselle devient un sport de
combat. Quelques bleus, un gateau au chocolat qui disparait derrière la
cuisinière, des verres cassés….
Au fur et à mesure de notre avancée vers le sud le vent
adonne un peu, le bateau marche vite et la vie à bord encore plus acrobatique.
La nuit nous réduisons la voilure nous
permettant de mieux dormir.
Le huitième jour Noëlle n’est plus pressée d’arriver. Cela
montre qu’elle est rentrée dans le rythme de ces longues navigations.
Nous apercevons très peu d’oiseau : très rarement un fou, un pouffin ou des
petits oiseaux noirs et blancs dont un est resté toute une nuit accroché à la
filière pour se reposer au grand dam d’Alice.
Très peu de bateaux croisés. Une toute petite dizaine vus
avec l’AIS, seulement 3 vus à l’œil. Un
était en collision parfaite venant face à nous en pleine nuit. Nous l’appelons
avec la VHF, il se détourne très courtoisement. J’aime voir passer les feux de ces
cargos en silence dans la nuit, ils vont
si loin si lentement, j’imagine les hommes de quart dans la passerelle
qui eux regardent les feux de ce voilier qui va si lentement….
Nous avons l’occasion de faire trois fois la fête :
D’abord réveillon de Noël avec foie gras maison, saumon
fumé, cuisses de canard, gateau le tout arrosé de champagne. Nous échangeons nos
cadeaux surtout que c’est l’anniversaire de Noëlle.
Puis c’est le passage de l’équateur. A cette occasion nos
jeunes nous gratifient d’une chorégraphie dans leur bleu de travail au cours de
laquelle ils jettent à la mer une bouteille contenant un message pour celui qui
la trouvera …. Nous n’oublions pas d’ouvrir une bouteille de champagne et de
commencer par en donner un verre à Neptune pour le remercier..
Enfin c’est le passage à la nouvelle année : réveillon
avec champagne, cuisse de canard…. Nous levons nos verres pour nous souhaiter
bonne année 2014 le 31 à 20h heure
locale mais minuit en France…
Le 1er janvier à la tombée de la nuit nous
apercevons les lueurs de la ville de Joao Pessoa, puis les premières lumières.
Le phare attendu et censé être visible à 16miles en fait ne marche pas !
Nous trouvons péniblement les feux du
chenal parmi toutes les lumières de la côte. Nous remontons le chenal sans nous
tromper (ici le vert est à babord et le rouge à tribord). Nous mouillons à l’extérieur du chenal devant le port de
commerce. Le bateau ne bouge plus. Quel calme. C’est le bonheur d’avoir
accompli cette transat et de se trouver au mouillage dans le silence, sans que
rien ne bouge avec la promesse d’un sommeil ininterrompu….
Le lendemain nous remontons le fleuve et arrivons à la
marina de Jacaré où nous allons laisser le bateau quelques mois. Il est temps
pour nous de jouer notre rôle de grandparents….
Voilà pour chacun de nous cette traversée résumée en trois
mots :
Pour Noëlle : Eprouvante , Harmonieuse et Conviviale.
Pour Alice : Grandissante, Inoubliable, Etoilée..
Pour Théo : Salivante, Touchante, Merveilleuse
Pour moi : Rapide , Elégante (on
passe du système des alizés du NE à ceux du SE par un étroit pot au noir), Partagée (C’est ma première transat avec un équipage aussi nombreux). Je
rajoute encore un adjectif : Sereine : en effet le bateau est bien
préparé ( un régulateur d’allure en cas de problème avec le pilote
automatique etc), je n’étais pas stressé par de possibles problèmes techniques comme
lors de mes précédentes traversées et puis c'est ma quatrième traversée : on s'habitue.
Quelques données un
peu plus techniques :
La longueur de cette transat sur la carte est de 1610 miles.
Nous avons fait un petit peu plus car nous avons suivi d’abord une route sud
puis incliné progressivement vers l’ouest.
Nous avons mis 10 jours et demi. En 24 h la plus courte
distance parcourue : 124
miles, la plus longue 175.
Le GPS a enregistré une pointe à 13,6 noeuds. Je pense qu'il est plus marseillais que moi! En tous cas nous avons souvent dépassé 10 noeuds.
Le GPS a enregistré une pointe à 13,6 noeuds. Je pense qu'il est plus marseillais que moi! En tous cas nous avons souvent dépassé 10 noeuds.
Nous avons utilisé le moteur seulement 2h (dans le pot au
noir) et au départ et dans le chenal d’arrivée.
Nous avons été toujours babord amure. Souvent sous
trinquette. Nous avons tangonné le génois à deux reprises pendant 2h dans les
alizés de NE.
Au sortir du pot au noir le vent était tendance très sud et
nous avions du mal à faire cap sur Jacaré, aussi nous avons serré le vent même
quand il a adonné. Nous sommes passés à 30 miles à l’est des rochers de St paul et de Fernando
de Norohna.
Nous avons consommé 5 l de gasoil et 3 bouteilles de champagne…..
Au départ de Mindelo |
Eprouvant? Vous avez dit éprouvant? |
Préparation du réveillon de Noël |
Le gâteau d'anniv. |
Nos cadeaux |
Dans le pot au noir |
Théo et Alice avec leurs cadeaux |
Le tazard |
En communication avec Michel |
Bain de pied |
Effet de voile lesoir. |
Les grains du pot au noir sur le radar |
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Le poisson lune oblong |
Jacaré est connu pour son joueur de saxo qui interprète le Bolero de Ravel tous les soirs |
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